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J'ai passé un bon moment, même si j'ai eu un peu du mal à rentrer dedans. L'univers est très intéressant, mais c'est un peu dense au début et il y a beaucoup d'éléments qu'on ne comprend pas forcément direct. Je ne saurais pas dire si c'est un défaut ou une qualité : d'un côté, lea lecteurice n'est pas pris.e pour un. idiot.e et on n'a pas forcément besoin de tout savoir d'un coup, d'un autre côté ça rend plus compliqué le fait de rentrer dans le livre; personnellement, j'aime bien me creuser un peu la tête. J'ai trouvé le personnage principal plutôt attachant, il est très puissant mais pas invulnérable, et il a ses propres insécurités qui ont du sens au vu de son histoire. Et il y a de la représentation (sans en faire des caisses, c'est traité comme un élément banal) et autant je suis critique politiquement du fait de se focaliser dessus autant je dois dire que ça me fait toujours plaisir et me réchauffe un peu le coeur d'avoir des personnages queer (au-delà du fait que ça me saoule quand il n'y en a pas)

J'ai profité d'une angine (= au lit pendant trois jours) pour le lire et franchement il fallait bien ça, c'est un gros pavé qui pourrait s'utiliser comme matériaux dans le BTP.
C'est très similaire au Prieuré de l'Oranger dans la narration et l'écriture. La multiplicité des points de vue et des storylines fait que c'est un peu long pour rentrer dedans mais une fois qu'on est dedans ça se déroule tout seul. C'est plaisant en termes de représentation quoique ça reste de l'heroic fantasy avec la part belle aux élu.e.s, à la noblesse, et à la monarchie. Contrairement au premier, il y a cependant plus de critique ouverte et explicite de ces systèmes politiques par certains personnages, ça m'a donné l'impression que l'autrice voulait dire "oui, je sais, c'est des systèmes politiques qui sont nuls et problématiques, je le pose là, mais c'est pas vraiment l'objet de mes histoires donc passons à autre chose".

C'est un livre intéressant sur les ambivalences et les effets pervers des politiques éducatives de massification scolaire des années 80-90. Le dispositif d'enquête est chouette et ça a du être un sacré taff derrière. Il y a des réflexions intéressantes en termes de positionnement. Faudrait que je lise plus de lui, mais je pense que je comprend un peu mieux les positions de Beaud sur la race et l'intersectionalité ces dernières années. Bien que je ne sois pas trop d'accord, je vois mieux d'où viennent certaines de ses positions compte tenu de ses travaux. Après ce genre de lecture c'est toujours un peu déprimant et laisse un goût amer dans la bouche, ça rappelle comment notre société peut être une machine à broyer des rêves et des vies. Concernant l'écriture, je ferais la même remarque que celle que j'ai faite pour Ceux qui restent de Coquard, c'est-à-dire que le style d'écriture "tout public" sans référence etc est peu convaincant à mon goût, sauf que là c'est franchement pire. Après l'avantage c'est que ça se lit vite et bien. Je suis content de l'avoir lu.

Je pense que c'est la première fois que je lis de la fantasy aussi intéressante politiquement. A quelques exceptions près j'avais un peu délaissé le genre pour la SF ces dernières années parce que j'avais l'impression de tourner en rond avec des récits et des univers souvent similaires et peu d'imagination sociale et politique. Mais là c'est bien écrit et ça traite bien 1) du colonialisme et 2) de la radicalité et de la légitimité de la violence politique. Avec des personnages qui sont complexes (quoique développés inégalement, ce qui est un peu dommage d'ailleurs mais le bouquin fait déjà 500 pages), qui ont leurs faiblesses, leurs contradictions, leurs positionnements, leurs oppressions mais aussi leurs privilèges, leurs doutes (souvent) et leurs certitudes (parfois). Et franchement j'ai kiffé. Et le système de magie a du potentiel et est plutôt bien réfléchi, mais s'il n'est pas complètement à maturité je pense. Par ailleurs, ça reste ancré dans des circonstances très similaires ce qui s'est passé dans la vraie vie par rapport au début de la première guerre de l'opium et c'est intéressant, ça fait de l'histoire contrefactuelle avec un peu de fantasy.