Clochix a cité Le ventre des hommes par Samira El Ayachi (Collection Regards croisés)
De quel droit réduisait-on mon existence à la pauvreté ? À quelque chose que je n’avais pas choisi, et qui pourtant me constituait. C’est un drôle d’exil que d’être exilée de son enfance. D’être perçue sous le prisme du manque. (…) C’est dans ce lis gris que je suis née à mon enfance. Nous avions appris à faire ensemble, elle et moi. Personne n’a le droit de réduire la plus importante période de ma vie à la misère. Et plus que ça. Au misérabilisme. À qui dire, qui peut m’entendre ? Ces conditions étaient les miennes, elles sont injustes, pourtant j’ai su en faire quelque chose, et pour ce temps là passé et perdu à tout jamais, comme le Petit Prince avec la rose, ces contours-là de mon existence où l’imagination était une nécessité pour tenir, je les aime. Il est une douleur plus forte que d’être plus pauvre que les autres. C’est d’être vue comme miséreux par ces gens-là. Et petit à petit par soi.
— Le ventre des hommes de Samira El Ayachi (Collection Regards croisés) (Page 325 - 326)